Réflexion sur l’implication des menaces sécuritaires dans l’espace sahélo-saharien sur la situation dans les camps de Tindouf

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I. Cadre général :

La situation globale dans la région sahélo-saharienne (sécheresse, famine, épidémies, terrorisme, traite humaine, trafic d’armes et de cocaïnes, criminalité transnationale organisée,…), constitue, plus que jamais, un défi majeur et réel à la communauté internationale, au regard des répercussions incertaines et dangereuses de ces divers challenges sur la paix et la stabilité dans ce vaste espace territorial.

A ce sujet, le Maroc a été parmi les premiers pays à attirer l’attention de la communauté internationale sur les risques d’instabilité et d’insécurité dans l’espace sahélo-saharien, vu la position géostratégique de cette zone par rapport aux Etats du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest, ainsi qu’aux pays européen et américain.

Dans ce contexte, l’ONU est appelée à jouer un rôle fédérateur et catalyseur des initiatives et efforts, visant à la mise en place et en œuvre d’une stratégie cohérente et inclusive, en vue de porter des solutions concrètes aux challenges multidimensionnels qui guettent l’espace sahélo-saharien.

La tenue, pour le première fois, d’une réunion de haut niveau sur le Sahel aux Nations Unies le 26 septembre 2012, et l’adoption d’une déclaration présidentielle sur cette région, le 10 décembre 2012, à l’initiative du Maroc, au cours de sa présidence du Conseil de sécurité, ainsi que l’adoption de diverses résolutions du Conseil sur la crise malienne (2056, 2071 et 2085), reflètent l’intérêt croissant de la communauté internationale à l’insécurité, l’instabilité et le manque de développement socio-économique dans cette zone.

Par ailleurs, la crise malienne a mis en exergue la complexité des enjeux sécuritaires et politiques de cette région volatile, et le risque de la voir s’étendre à d’autres pays de la région, comme en témoigne le dernier attentat terroriste perpétré sur le site gazier algérien, « In Amenas ».

Cet attentat a démontré la fragilité de l’Algérie dans la sécurisation de ses frontières et leur perméabilité devant les groupes terroristes opérant dans la région, d’autant plus que ce pays abrite sur son territoire, à Tindouf, des camps des populations dites « réfugiés », dont la situation risque de devenir plus vulnérable tenant compte des menaces terroristes et d’insécurité que connaît la région.

Dans ce cadre, l’inclination, de plus en plus manifeste, des membres du polisario à soutenir les activités terroristes dans cette zone (II) est de nature à mettre en péril la sécurité et la sûreté des populations des camps de Tindouf, dont l’unique mesure de protection internationale demeure la conduite impérative d’une opération d’enregistrement par le HCR (III).

II. Inclination du polisario vers les réseaux terroristes dans la région : source de menace et d’instabilité pour les populations des camps :

Plusieurs rapports d’ONGs internationales et de centres de réflexion, ainsi que des analyses de presse, ont établi l’existence de relations douteuses entre le polisario et les réseaux terroristes, notamment Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI), ainsi qu’avec les réseaux des trafiquants de drogue et d’armes dans la région sahélo-saharienne.

Ce glissement du polisario vers les activités terroristes pourrait s’expliquer par l’usure de son argumentaire, le désespoir de sa jeunesse, et l’affaissement de son idéologie marxiste-léniniste. Cette situation semble procurer les conditions favorables pour alimenter les tendances d’extrémise radical d’une bonne partie de ses membres, et leur rapprochement avec les divers réseaux illicites opérant dans la région sahélo-saharienne.

De même, la situation de vulnérabilité des populations des camps, conjuguée avec les politiques répressives de la direction du polisario, représentent un grenier fécond pour les groupes terroristes actifs dans la région, qui peuvent en puiser de nouveaux éléments disposant, déjà, d’une certaine expérience en matière de techniques de combats, les rendant, ainsi, opérationnels pour mener ou participer à d’éventuelles attaques terroristes.


Les rapports parus récemment sur la participation de certains éléments du polisario aux côtés des groupes terroristes dans les combats au nord du Mali suscitent, plus que jamais, des interrogations sur la responsabilité juridique et politique de l’Algérie (Etat partie à la Convention de Genève sur les réfugiés de 1951), dans la sécurisation de ses frontières et son rôle dans le pourrissement de la crise malienne.

Ces rapports ont été confirmés par les dernières déclarations du Ministre malien des Affaires Etrangères, M. Tiéman Coulibaly, qui vient de réaffirmer la présence de « jeunes sahraouis jihadistes, issus des camps de Tindouf », au sein des rangs de l’AMQI et du Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao).

Par ailleurs, la radicalisation des positions du polisario au sujet du processus de négociations mené sous l’égide des Nations Unies, pour aboutir à une solution politique négociée et consensuelle au différend régional sur le Sahara, ainsi que ses menaces récurrentes de revenir à la lutte armée contre le Maroc, ne font qu’entretenir la déception de ses membres, qui s’inclinent à adopter des idéologies extrémistes et radicales, en tant que nouvelle doctrine d’encadrement et d’action dans l’espace sahélo-saharien.

Cette situation devient de plus en plus préoccupante au regard du nombre croissant de rapts d’étrangers, qui met à nue la porosité des frontières entre les pays de la région, et leur incapacité à gérer, de façon unilatérale, les défis sécuritaires qui en découlent.

Ainsi, la crise malienne et ses implications régionales, l’approche sectaire et exclusive de l’Algérie en matière de lutte contre le terrorisme dans la région, et l’effritement du polisario, sont des facteurs d’instabilité continus, représentant une menace à la paix et à la sécurité dans la région. D’où, l’impératif du recensement des populations des camps en tant que mesure fondamentale de protection internationale visant à garantir leurs droits reconnus, au demeurant, par le droit international humanitaire.

III. Impératif du recensement des populations des camps de Tindouf : unique rempart de protection internationale vis-à-vis des mouvances terroristes :

Devant les challenges pré-cités et afin d’éviter l’utilisation éventuelle des camps de Tindouf à des fins terroristes, la communauté internationale devrait assumer sa responsabilité, en obligeant l’Algérie, en sa qualité de pays hôte, à permettre le recensement des populations des camps en tant que mesure de protection internationale, afin de déterminer leur nombre, identité et nationalité, et de prévenir leur instrumentalisation et leur recrutement par les mouvances terroristes opérant dans la région.

Il ne fait pas de doute, aujourd’hui, que la continuité de l’absence de ce recensement fait demeurer la précarité de la protection de ces populations, et favorise l’infiltration d’éléments terroristes et le recrutement éventuel de nouveaux membres, en contradiction flagrante avec le droit humanitaire international, qui interdit l’existence des groupes armés dans les camps des réfugiés et prévoit l’impératif de l’enregistrement, comme préalable à l’identification des personnes, l’évaluation de leurs besoins, la quantification et la destination de l’assistance humanitaire.

De même, le maintien, par le Gouvernement algérien du flou juridique sur la situation dans les camps, et son refus d’accorder le libre accès au HCR, afin de procéder au recensement, renforcent la vulnérabilité des populations qui y vivent, dont les droits les plus élémentaires sont bafoués et abusés, et risquent de les transformer en sanctuaire sécurisé de repli des éléments terroristes de la région.

La fragilité des camps de Tindouf et l’exposition de ses populations à des risques et menaces graves, ont été manifestées par l’épisode du rapt d’étrangers dans les camps ayant eu lieu en novembre 2011, ce qui a constitué une preuve supplémentaire des risques d’infiltration d’éléments terroristes au sein dans camps et de la complaisance, voire de complicité, dont pourraient jouir ces derniers parmi les membres du polisario.

Dans ce contexte, le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) est appelé à observer ses obligations et principes statutaires, en conduisant un recensement des populations des camps, tenant compte des appels lancés, depuis 2010, par le Secrétaire Général de l’ONU consignés dans ses rapports sur la question du Sahara marocain, ainsi que les résolutions 1979 (2011) et 2044 (2012) du Conseil de sécurité de l’ONU.

Il s’avère, en définitive, que le rapprochement du polisario avec les groupes terroristes opérant dans la région, et la responsabilité de l’Algérie dans la sécurisation de son territoire, y compris, à Tindouf, constituent des défis réels à la communauté internationale, qui risque de voir des éléments du polisario se greffer à la tendance islamiste radicale dans la zone sahélo-saharienne.

IV. Appréciations générales :

Conscient des défis et enjeux auxquels fait face la région sahélo-saharienne, la conduite d’une opération d’enregistrement des populations des camps de Tindouf est devenue une nécessité impérieuse, en tant que droit inaliénable de ces personnes pouvant relever de la compétence du HCR.

A cet effet, le Maroc n’a cessé, depuis plus de trois décennies, à demander avec insistance la conduite d’un recensement fiable de ces populations, en tant que mesure de protection internationale, visant à leur garantir leurs libertés fondamentales (expression, d’opinion, etc…), et leurs droits au retour librement consenti.

Il convient de signaler que, nonobstant les manœuvres dilatoires de l’Algérie et du polisario, visant à imposer le chiffre de 165.000 réfugiés en tant que donnée de référence pour les aides humanitaires octroyées aux populations des camps, le Programme Alimentaire Mondiale et le HCR ont décidé, à compter du 1er septembre 2005, suite à une pression de notre pays, d’accorder une aide en se basant sur le chiffre de 90.000 réfugiés en attente de la conduite de l’opération de recensement.

Prenant en considération ce qui précède, il semble qu’une action anticipative du Maroc sur la question du recensement est opportune, et ce en :

*Invitant le HCR à rendre compte de ses initiatives et actions prises en vue de donner suite aux appels du Secrétaire Général et aux dispositions pertinentes des résolutions 1979 et 2044 du Conseil de sécurité, qui lui ont demandé de continuer à « envisager d’enregistrer les réfugiés des camps de Tindouf » ;

* Mettant à profit l’échéance d’avril prochain relative à la prorogation du mandat de la MINURSO, pour que la nouvelle résolution qui sera adoptée, contienne des directives claires afin que l’Algérie assume sa responsabilité, et partant, permettre au HCR de conduire le recensement voulu et recherché par la communauté internationale ;

*Situant l’impératif du recensement dans le contexte des conclusions de M. Christopher Ross, Envoyé Personnel du Secrétaire Général de l’ONU, qui avait souligné, à l’issue de sa visite dans la région en novembre 2012, l’urgence d’aboutir à une solution politique, négociée et consensuelle au différend régional sur le Sahara, tenant compte de la situation volatile et instable dans l’espace sahélo-saharien.

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