Maroc : Opinions sur la réforme constitutionnelle de 2011

Point « Casting » réforme constitutionnelle
Périmètre d’analyse : leaders d’opinion (hors mouvement 20 février) cités par les retombées médiatiques dans les principaux supports étrangers écrits et audiovisuels
LEADERS POLITIQUES MAROCAINS
Le 16 juin Léa-Lisa Westerhoff interroge sur France 24 Driss El Yazami («On est en train de changer de système institutionnel marocain avec de très grandes innovations») et Fathallah Oualalou («Le Maroc, dans sa globalité, a choisi l’option de la réforme»). On note également l’intervention de Mahmed M’fadel sur France O le 20 juin, présenté comme membre du PAM : « le Roi a donné au peuple le droit de s’exprimer ». Le 18 juin, Mbarka Bouaida déclare à Associated Press : « nous aurons probablement besoin d’une autre Constitution d’ici dix ou quinze ans, mais nous devons prendre celle-ci d’abord et donner le temps aux partis politiques de se renforcer ».
Le 18 juin Nabil Benabdellah déclare à l’AFP « ce texte permet une clarification et une séparation des pouvoirs à côté d’un rôle religieux (du roi) séparé du rôle politique, ce qui est important ». Interrogé par Christelle Marot pour La Croix, Omar Balafrej a produit le 20 juin un témoignage ambigu : « Les gens se demandent à quoi servent l’État et les institutions dans un pays comme le Maroc, il y a un manque de confiance total, et la démocratie reste le seul moyen possible de restaurer cette confiance ». Le 20 juin, Garance Le Caisne cite Youssef Belal dans le Journal du Dimanche qui analyse « Le roi tente de transférer la contestation sociale et politique vers le futur gouvernement ».
Le 18 juin, cité par l’AFP Saadeddine Othmani avance que « comparé à l’actuelle Constitution ce projet est une avancée importante ». Le 19 juin Le Monde cite Lahcen Daoudi selon lequel la réforme consacre «une forme de laïcité qui s’approche du modèle européen ». Le même jour Abdelilah Benkirane fait une déclaration à RFI dans le sens du soutien à la réforme. Le lendemain dans le Journal du Dimanche, Saadeddine Othmani fait une sortie plus nuancée : « Tout ce que le roi a promis dans son discours du 9 mars a été tenu, mais cette avancée est-elle suffisante ? ». Le 20 juin dans La Croix, Mustapha Ramid produit un témoignage positif « C’est un texte progressif, qui devrait contribuer à démocratiser le pays ». Sur le même support Mohamed Moatassim (Badil Hadari) indique « même si le texte n’est pas à la hauteur des attentes de tous les Marocains, cela va dans le bon sens ».
Le 21 juin sur le quotidien émirati The National, John Thorn cite Hassan Benajeh expliquant qu’il « met ses exigences politiques de côté, le mouvement en soi est un signe de bonne santé, il est temps pour jeunes d’être plus constructifs, aller dans les rues crier son mécontentement n’est pas suffisant ». Le 21 juin, RFI a cité Noubir Amaoui et Aziz Adelkrim de la CDT, cette retombée est finalement positive du fait du titre de l’article « Une campagne référendaire plus ouverte au Maroc »
De plus quelques passages de M. Khaled Naciri
CHERCHEURS
Dans Libération le 20 juin, Mohammed Madani (professeur de sciences politiques à Rabat) souligne qu’en « matière de répartition et d’architecture du pouvoir cette Constitution est loin d’être démocratique ». Bachir Rachdi, cofondateur de Transparency Maroc et du Forum citoyen pour le changement démocratique, estime que « c’est une démocratie en trompe-l’œil, il y a de vraies avancées mais aussi beaucoup de verrous qui n’ont pas sauté » (cette réflexion inspirera le titre de l’article).
Le 17 juin l’AFP cite factuellement Mohamed Darif sur la sacralité du roi. Le 18 juin sur France Culture, il estime que « la Constitution ne répond pas aux revendications du mouvement du 20 février : on est loin de la monarchie parlementaire». Le 21 juin Mohamed Darif indique à l’agence Reuters que la réforme «marque le début de la transition démocratique et non l’entrée dans la démocratie, elle permettra aux partis de se restructurer »
Le 20 juin, France 24 interviewe Omar Bendourou, professeur de droit constitutionnel à Rabat, qui estime que la réforme « ne modifie en rien le statut du roi qui reste la clé de voûte du régime politique marocain »
Le 18 juin Khadija Mohsen-Finan indique à l’AFP « on va vers un équilibre plus grand des pouvoirs, mais à l’aune des attentes suscitées par les révolutions arabes, les avancées sont très faibles ».
Le 17 juin Pierre Vermeren déclare à l’AFP que « Entre le discours royal du 9 mars, dans lequel il avait promis des changements, et aujourd’hui, trois mois se sont écoulés sans qu’il y ait le moindre acte politique important ». Le 18 juin il indique à Radio Vatican que « les changements annoncés sont en réalité très modestes ». Le même jour il déclare à l’AFP : « après l’attentat de Marrakech le roi se pose en garant de la stabilité contre le chaos qui guette certains pays arabes ». Enfin le 20 juin sur Europe1, il estime que « le Maroc est entraîné dans le mouvement d’ouverture entamé en Tunisie ».
Témoignages positifs :
Le 19 juin Jawad Kerdoudi (IMRI) explique au Christian Science Monitor que « le mouvement du 20 février est fini parce que le roi a répondu aux aspirations »
Le 20 juin Mohamed Tozy donne une interview à George Malbrunot du Figaro, dans laquelle il pose que « les cybermilitants radicaux ont perdu la main sur le terrain, ils peuvent être unis pour manifester mais quand il s’agit de présenter des propositions claires leurs divisions éclatent au grand jour ».
ECRIVAINS
Le 17 juin, France 24 a invité l’écrivain franco-marocain Youssef Jebri qui a vivement critiqué le discours royal avant de prétendre « craindre de revenir au Maroc pour des raisons de sécurité ». Le même jour, Al Jazeera cite Nabila Ramdani, écrivain et spécialiste des affaires nord-africaines, qui indique qu’il « y a un fossé entre la façon dont le monde voit le Maroc et la réalité profonde des problèmes internes du pays en terme d’analphabétisme, de corruption et de chômage »
JOURNALISTES
Le 19 juin le journaliste Mohamed Montasir explique au Christian Science Monitor que « si le roi s’en allait il s’en suivrait un chaos indescriptible, ce que les Marocains veulent n’est pas une révolution mais plutôt un mouvement contre les privilèges ». Le 20 juin sur la RTBF, le témoignage du correspondant Mehdi Meddeb indique que « des contre-manifestants violents n’hésitent pas à s’en prendre aux journalistes ». Le 21 juin, l’agence Reuters cite Ali Anouzla (Lakome) qui souligne « avec l’historique de promesses de réformes non tenues, la monarchie aurait pu faire un plan de réforme plus authentiques en annonçant une séparation entre pouvoir et argent »
FEMINISTES
Le 20 juin dans La Croix, Fouzia Assouli (Fédération de la ligue démocratique des droits des femmes) estime après une évaluation positive que « ce n’est pas encore une monarchie parlementaire, mais c’est une question de temps ». Le 20 juin dans La Croix, témoignage de Zineb El Rhazoui s’emporte « parler de liberté de culte ou d’égalité hommes-femmes dans le cadre islamique est une insulte à l’intelligence du peuple Marocain ». Le 20 juin dans Le Monde, Isabelle Mandraud donne la parole à Zineb El Rhazoui qui s’avoue « très déçue, c’est même dangereux car cela risque de figer les choses pour les années à venir. (…) le roi crée un conseil de sécurité mais qui ne répondra à aucun contrôle (…) il promet l’indépendance de la justice mais il nomme les juges et préside le Conseil supérieur de la justice »
PROFESSIONELS
Le 18 juin sur Le Progrès, Younès Sadki (directeur du prestigieux hôtel Michlifen) a livré un témoignage positif : « Sa majesté a fait beaucoup, et ce depuis des années, pour le Maroc et les Marocains. Tout cela n’a rien à voir avec ce qui s’est passé en Égypte ou en Tunisie ». Le 20 juin, l’avocat Brahim Bouabid cité par Léa-Lisa Westerhoff dans Libération souligne qu’avec « les printemps arabes il y avait un boulevard sur lequel les partis auraient pu s’engouffrer mais ils ne l’ont pas fait ». Le 21 juin, l’agence Reuters cite Richard Holley (MACP) qui préviens que « les critiques de la réforme laissent le mieux se mettre en travers du chemin du bien, le Maroc est profondément traditionnel et est encore en phase de modernisation ».
Le 16 juin sur France Inter, Fouad Abdelmoumni estime que la réforme « est simplement une démarche tactique dans laquelle certaines concessions sont faites pour éviter le passage à une véritable démocratie parlementaire ». Le 20 juin il déclare à France Soir que « Le roi continue de disposer de pouvoirs exorbitants et de toutes les manières, la réforme politique est un processus long et périlleux »
ANALYSTES ETRANGERS
• Le 17 juin, Agnès Levallois (spécialiste du monde arabe) produit un témoignage positif sur I-Télé estimant que « S.M. Mohammed VI a pris les devants contrairement aux autres dirigeants du monde arabe ». Le 18 juin sur RTL, elle souligne que « les exigences des jeunes contestataires ne sont pas partagées par la majorité (…) les Marocains vont pouvoir davantage s’exprimer »
• Le 19 juin Nacer Djabi, sociologue à l’université d’Alger, estime dans La Croix que « nombre d’Algériens ont écouté en direct le roi Mohammed VI, si le projet de réforme est un succès au Maroc cela incitera à porter plus encore nos regards vers l’Ouest »
• Le 19 juin Jean-Noel Ferrié, directeur de recherche au CNRS à Rabat est longuement interviewé par La Croix et produit un témoignage très positif, indiquant notamment que « ce texte va exercer une pression dans la région ». Le 20 juin il est interviewé par L’Express, puis il récidive le 21 juin sur Telos-EU.com avec une tribune plus technique sur l’applicabilité de la constitution.
• Le 20 juin, le Nouvel Observateur interviewe Jean-Claude Santucci (chercheur associé à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman) qui souligne qu’un « référendum dont les résultats sont tièdes pourrait relancer les contestations (…) cette manière de proposer la réforme aussi vite est également un moyen de la populariser, comme cela avait été fait au moment de la réforme du Code de la famille ou de la régionalisation »
• Le 18 juin dans une analyse du quotidien canadien Le Devoir, Jean-Louis Roy (créateur de l’Observatoire mondial des droits de l’homme) qualifie l’approche réactive du roi du Maroc de « bien reçue par les Marocains, ce que réclament aujourd’hui les Tunisiens et ce que réclament en partie les Égyptiens, Mohammed VI l’a déjà fait »
• Le 21 juin, l’agence Reuters cite Lise Storm (université d’Exeter) qui souligne que la constitution « n’est pas démocratique, c’est un pas dans la bonne direction mais qui ne va pas assez loin »
TV PANARABES
On note que le soir même du discours sur Aljazeera English, Ahmed Reda Benchemsi a livré une évaluation sévère sur le discours royal, qualifiant la réforme de « cosmétique »
Remarque méthodologique : s’agissant d’une note portant sur le « Casting » , les articles et éditos très positifs ne sont pas ici pris en compte ( marc gibnsberg, kenneth pollack,jennifer rubin, florentino porteri…)
DIAGNOSTIQUE
En dehors du PJD qui parait plus naturellement sollicité par les journalistes étrangers pour réagir sur le projet de réforme, il apparait que le projet de nouvelle constitution souffre – vu de l’étranger – d’un déficit d’engagement de la classe politique nationale.
Par ailleurs le fait qu’un «écrivain» mineur comme Youssef Jebri aie eut le privilège de commenter le discours royal sur une chaîne aussi importante que le canal francophone de France 24 le 17 juin indique la persistance d’un sérieux problème de «casting» !!!!
Il faut aussi signaler les tribunes signées par Saad Tazi, Abdelmalek Alaoui et Driss Alaoui Mdaghri sur le site d’information Atlantico.fr, et celles de My Ahmed Charai( hudson et foreign policy) des efforts louables mais qui ne permettent pas de renverser la tendance.
On note par ailleurs l’absence de retombées significatives (allant au delà du factuel) dans les agences Bloomberg, EFE et Europa Press qui d’habitude sont plus productives.
On remarque enfin que la grande majorité des chaines TV et émissions radio invitent systématiquement un membre du 20 février pour réagir aux réformes, en plus d’un leader d’opinion «externe» au mouvement.
RECOMMANDATIONS
En terme de casting et de messages, les principales agences de presse de la sphère francophone (AFP et Reuters devraient faire l’objet d’une attention particulière et dans une mesure moindre AP
a titre d’illustrations dépêches négatives Afp qui reprend en bloc vermeren + mohsen finan et dépêche Reuters qui cite en bloc chercheuse anglaise anti+ omar radi + Anouzla !!!!)
De même nous relevons que paradoxalement les médias audiovisuels et écrits Français se caractérisent jusqu’à présent par la cohabitation principalement de 3 catégories de contributeurs :
• des voix anti fortement engagées qui se parent de manière pernicieuse d’une légitimité d’analystes( mohsen finan, vermeren…) ou journalistique ( Lise Lea Westehoff, Farid Aichoune..)
• des voix Marocaines anti ( membres du 20 févier, boubker Jamai…)
• des analystes francais pro discours( agnés levallois, jean noel ferrié, ou la canadienne lysiagne gagnon…)
Aussi et afin d’atteindre un seuil optimal de visibilité et de légitimité , nous recommandons que des personnalités Marocaines telles que profils ci-après soient sollicitées avec profit (certaines se sont exprimées dans les médias nationaux mais pas à l’international) :
• Politiques : Larbi Messari (hispanophone) ; Ali Bouabid ; Fatima Zahra Mansouri ( francophone) ; Mohamed Elyazghi ; Yassir Znagui (anglophone)…..
• Chercheurs : Mohamed Kenbib ; Yossef Ben Meir, ( des membres de CRRC si pas de devoir de réserve}…
• Journalistes : Mouna Hachim ; Leila Slimani ; Nadia Salah ;; Laurence Oiknine ; Ali Baddou….
• Ecrivains : Tahar Benjelloun ; Pierre Assouline…..
• Féministes : Aïcha Echenna ; Fatema Mernissi ; Fatema Hal,touria Bouabid…
• Professionnels : RedOne ; Richard Attias ;Pr Khacchani ( hispanophone), Leila Ghandi ; Mehdi Qotbi ; Karim Hajji ; Aziz Senni, Fathallah Sijilmassi…..
• Acteurs culturels : Faouzi Skalli ; Saïd Taghmaoui ;Driss Ajbali, Mohamed Merhari ( momo) ; Don Bigg….
• Sportifs : Hicham El Guerrouj ; Samir Azzimani ; Benazzi ; Nawal Moutawakil
• Analystes étrangers : Alexandre Adler ; Abdelwahab Meddeb ; Emmanuel Todd ; Youssef Courbage….