Relations Maroc-UE : Etat des Lieux et Perspectives

Tags : Maroc, Union Européenne, UE, statut avancé, relations bilatérales,

Le Maroc et l’UE ont développé durant plus de 40 ans une coopération riche et multidimensionnelle, dont les principales réalisations sont :

Accord Commercial(1969); Accord de coopération(1976); Accord d’association(1996); Accord de coopération scientifique et technologique(2003); Plan d’action de voisinage(2005); Plan d’action dans le domaine du terrorisme(2005) ; Accord de l’Open sky(2006); Accord sur certains aspects des services aériens -Accord horizontal(2006); Accord Galileo(2006); Quatre Accords de partenariat dans le domaine de la pêche(dont le dernier en 2007); Déclaration commune sur l’énergie(2007); Document conjoint sur le Statut avancé(2008);

Accord établissant un Mécanisme de règlement des différends en matière commerciale(2010).
Les accords signés et qui sont en cours de ratification par le Parlement européen sont:
Accord de libéralisation du commerce des produits agricoles, produits agricoles transformés et produits de la pêche (signé, le 13 décembre 2010); Protocole sur la participation du Maroc aux programmes de l’UE (signé, le 13 décembre 2010).

Certains accords sont en cours de négociations :
-Accord sur la libéralisation du Commerce des services et le droit d’établissement;
-Accord sur l’évaluation de la conformité et l’acceptation des produits industriels (ACAA); Accord sur la réadmission des personnes en situation irrégulière; Plan d’action pour la mise en œuvre du Statut avancé.

Plusieurs autres accords sont prévus dans le cadre du document conjoint sur le statut avancé et qui seront inclus dans le futur plan d’action Maroc-UE. Il s’agit, notamment de :

-Accord de Libre Echange Global et Complet. Soutien du Maroc aux déclarations et décisions du Conseil de l’UE en matière de PESC. Accord de coopération entre le Maroc et Eurojust. Accord de coopération stratégique entre le Maroc et EUROPOL ;
-Accord-cadre sur la sécurité des informations dans le domaine de la PSDC ;
-Accord-cadre pour la participation du Maroc aux opérations de gestion des crises de l’UE ; Partenariat pour la Mobilité (Dialogue pour la migration, la mobilité et la sécurité).

En outre, un processus de rapprochement réglementaire dans le domaine du Marché intérieur a été lancé en 2010 portant sur les « services financiers – Assurances », les « Marchés Publics » et les « Normes et réglementations techniques ».

Régularité des réunions Maroc-UE :

Les différentes structures de mise en œuvre des relations entre le Maroc et l’UE se réunissent de manière régulière depuis l’entrée en vigueur de l’Accord d’association :

9 sessions du Conseil d’Association ; 8 sessions du Comité d’association ; 9 sessions du Groupe de travail « Affaires Sociales et Migration » ; 9 sessions du Dialogue Economique ; 8 sessions du Comité de Coopération douanière ; 7 sessions du Sous-comité « Recherche et Innovation » ; 7 sessions du Sous-comité « Marché intérieur » ; 7 sessions du Sous-comité « Transport, Energie et Environnement » ; 6 sessions du Sous-comité « Agriculture et Pêche » ; 6 sessions du Sous-comité « Justice et Sécurité » ; 6 sessions du Sous-comité « Droits de l’Homme, Démocratisation et Gouvernance » ; 6 sessions du Dialogue Politique Renforcé ; 5 sessions du Sous-comité « Industrie, Commerce et Services ».

Plusieurs réunions importantes ont, également, eu lieu au cours des dernières années, notamment :

Le premier Sommet Maroc-UE (mars 2010) ; les consultations politiques au niveau ministériel en marge de l’Assemblée Générale de l’ONU, ainsi que des rencontres entre les responsables marocains et les représentants des différents Comités thématiques du Conseil de l’UE, tels que le COTER, le COHOM, le COAFR et le COPS.

Contribution marocaine au Partenariat Maroc-UE :

Le Maroc a fait le choix de se rapprocher de l’Europe pour des raisons géographique, historique et humaine, et dans l’objectif de bâtir des relations mutuellement bénéfiques.

Le Maroc a toujours exprimé sa volonté de renforcer de manière continue sa coopération avec l’UE partant du principe que les deux parties peuvent faire face ensemble et de manière responsable et solidaire aux défis communs de sécurité et de développement que connait la région euro-méditerranéenne.

Ainsi, le Maroc s’est engagé de manière volontaire dans le processus d’édification et de consolidation du Partenariat euro-méditerranéen. Depuis l’adoption de la déclaration de Barcelone en 1995, le Maroc n’a cessé de contribuer activement à ce processus devenu en 2008 l’Union pour la Méditerranée(UpM), à travers le lancement d’initiatives, l’accueil des Conférences ministérielles, la participation à la gestion des structures de l’UpM, etc.

Il s’est, également, investi dans la réalisation des objectifs de la Politique européenne de voisinage, dont les finalités affichées initialement convergeaient avec la demande marocaine d’un statut avancé dans ses relations avec l’UE. Le Statut avancé Maroc-UE a contribué à renforcer la PEV et lui a conféré davantage de visibilité.

Bien que le Maroc ait quelques difficultés au niveau du dialogue UE-Afrique, il n’en demeure pas moins qu’il a toujours contribué vigoureusement à ce processus dans l’objectif de renforcer le Partenariat entre l’Europe et l’Afrique et de dépasser certains obstacles concernant la gestion de quelques dossiers, notamment les questions de la migration, des droits de l’Homme et la gestion des crises dans certains pays africains.

Apport européen au Partenariat Maroc-UE :

Contrairement à la contribution très importante du Maroc, qui passe souvent inaperçue car elle est généralement non quantifiable, l’apport de l’UE reste relativement modeste par rapport aux enjeux politique, économique et social du Partenariat Maroc-UE. Il se résume à l’enveloppe financière accordée par la Commission européenne bien minime qu’elle soit comparée à la longévité des relations Maroc-UE.

Dons :

Les deux parties ont conclu entre 1978 et 1992 quatre protocoles financiers d’un montant total de 1,091 milliard d’euros dont 47% de dons, soit 513 millions d’euros.

Les enveloppes budgétaires allouées au Maroc dans le cadre de MEDA I (1995-1999) et MEDA II (2000-2006) se sont élevées, respectivement, à 656 et 980 millions d’euros, soit un total de 1,636 milliard d’euros.

Dans le cadre de l’IEVP, le Maroc et l’UE ont conclu deux Programmes Indicatifs Nationaux (PIN) d’une enveloppe globale de plus de 1,234 milliard d’euros : 1er doté d’une enveloppe budgétaire de 654 millions d’euros pour la période 2007-2010 ; et le 2ème doté d’une enveloppe budgétaire de 580,5 millions d’euros, au titre de la période 2011-2013.

Un simple calcul démontre que la moyenne annuelle de l’aide financière européenne accordée au Maroc depuis le début de nos relations bilatérales, il y a plus de 40 ans, est d’environ 85 millions d’euros par an, soit une moyenne annuelle par tête d’habitant de près de 3 euros.

Prêts : Le montant total des accords de prêts signés avec la BEI, depuis la conclusion du premier protocole financier UE-Maroc 1978, s’élève à près de 4,6 milliards d’euros (à ne pas confondre avec les encours versés).

Difficultés du Partenariat Maroc-UE

Les responsables européens (Commission européenne et SEAE) ne communiquent pas de manière objective sur le rôle du Maroc dans les espaces euro-méditerranéen, euro-voisinage et euro-africain. Lorsque ces derniers évoquent le Maroc et ses réalisations, c’est toujours dans le sens du « bon élève » et non pas pour ce qu’il a apporté à l’UE (ex. Le Maroc a contribué à l’adoption de l’approche globale de l’UE dans le domaine migratoire, le Maroc a donné du contenu et de la visibilité à la PEV,…).

Les résultats de la coopération entre le Maroc et l’UE sont, certes, positifs en comparaison avec les autres pays de la région mais ils demeurent en deçà des ambitions affichées par le Maroc. Ces réalisations sont le fruit de l’engagement du Maroc à accomplir son développement dans tous les domaines.

L’UE, dont l’apport n’est, en fin de compte, qu’un élément accompagnateur de certains aspects de la coopération bilatérale, ne cherche, en réalité, qu’à exploiter cette contribution minime pour son image au niveau international. En témoigne le contenu du projet du Plan d’action pour la mise en œuvre du Statut avancé qui reflète la réalité d’un Partenariat déséquilibré.

La coopération entre le Maroc et l’UE a été, souvent, guidée par la logique européenne qui privilégie un Partenariat à plusieurs vitesses selon ses priorités.

La Coopération entre le Maroc et l’UE a été toujours confrontée au Principe de subsidiarité à chaque fois qu’il s’agissait d’une question demandée par le Maroc.

Le Traité de Lisbonne a compliqué davantage la coopération entre le Maroc et l’UE à travers le rôle de codécision accordé au Parlement européen, notamment en ce qui concerne la ratification des Accords internationaux. Certains accords marocains ont rencontré des difficultés dues, principalement au lien que certains Eurodéputés adversaires de notre souveraineté nationale ne cessent de faire entre l’application de l’Accord d’association et la question du Sahara.

Notre pays sera davantage et de manière quasi-automatique mis en difficulté par des manœuvres visant à bloquer toute évolution de nos relations avec l’UE, notamment dans le cadre du statut avancé.

Crise Maroc-UE liée à l’Accord de pêche

La décision prise par le Maroc suite au vote du Parlement européen contre l’extension du protocole annuel de l’accord de pêche est judicieuse et légitime.
Cette position, qui doit être maintenue et renforcée si nécessaire, est un message fort destiné à toutes les composantes de l’UE : 1/ le SEAE et le PE doivent comprendre que le Maroc est un pays souverain et ne cédera jamais sur la question du Sahara; 2/ la Commission européenne doit doivent assumer pleinement sa responsabilité concernant les engagements pris avec le Maroc; 3/ les Etats membres de l’UE doivent comprendre que le Maroc ne peut tolérer cette démarche irresponsable et incohérente des Institutions de l’UE.

Le Maroc doit faire de cette crise une réelle opportunité pour redémarrer sa relation avec l’UE sur de nouvelles bases en tenant compte des changements internes au Maroc et au sein de l’UE, de la place du Maroc au niveau régional et international, et de la nouvelle donne régionale qui a démontré que le Royaume a fait, depuis plusieurs années, des choix adéquats qui font de lui, aujourd’hui, un pays stable politiquement et ouvert économiquement.

Scénario de Sortie de Crise

Le Maroc a démontré tout récemment son engagement et sa volonté à poursuivre et à renforcer ses relations avec l’UE, notamment lors des négociations sur le Plan d’action, des discussions sur la migration et des négociations sur les services.

Il est, donc, évident que la responsabilité de la situation actuelle incombe exclusivement à l’UE qui doit clarifier son attitude à l’égard du Maroc.

Plusieurs signaux négatifs ont été délivrés de manière indirecte au Maroc depuis plusieurs mois, notamment dans la foulée du printemps arabe.

Après la publication du communiqué marocain qui a surpris les responsables européens à Bruxelles, il serait judicieux de différer toutes les réunions et rencontres bilatérales prévues dans les quelques prochaines semaines.

Il est opportun à ce stade que le Maroc invite la partie européenne à une 2ème réunion du Sommet Maroc-UE pour clarifier la situation des relations bilatérales et discuter de l’avenir sur des bases saines et transparentes qui reflètent de manière claire et définitive la vision de l’UE. Le Président du Parlement européen est à associer à ce Sommet.

L’expérience a montré que tous les pays qui ont eu des crises de ce genre avec l’UE ont eu gain de cause en fin de compte. Le Maroc a les atouts nécessaires pour renverser en sa faveur cette situation voulue et provoquée par les ennemis.

Le Maroc doit œuvrer pour qu’il y ait un avant et un après la crise dans le sens où les relations entre le Maroc et l’UE doivent être davantage renforcées et clarifiées une fois pour toute après cette épreuve.

Le Maroc doit inviter l’UE à asseoir ensemble une visibilité et une méthodologie de travail claire et saine à même de dépolluer le partenariat et de la prémunir de tout élément nuisible (mêler la question du Sahara et des droits de l’Homme dans des accords purement techniques).

Le Maroc doit œuvrer pour l’adoption d’un accord global (paquet d’accord). Les avantages d’une telle démarche sont les suivants :

1. Eviter des « allers retours » au Parlement européen, qui n’hésitera pas, à chaque occasion, à bloquer les accords conclus entre les le Maroc et l’UE ;

2. Le paquet global pourrait donc inclure aussi bien des accords qui intéressent le Maroc (accord agricole à titre d’exemple) que ceux qui sont dans l’intérêt de l’UE (la réadmission par exemple). Cette démarche obligera les responsables européens, institutions et Etat membres, à défendre le paquet global de manière sérieuse et responsable et à œuvrer pour sa ratification du par le PE ;

3. Le Maroc gagnerait en termes de timing dans la mesure où il pourra entrer directement dans une négociation sur l’accord global sans passer par le Plan d’action. Ledit plan d’action pourrait être annexé à cet Accord. Les discussions sur le paquet global prendront une dimension plus importante et stratégique, concernant la finalité du Partenariat, les défis communs, la responsabilité partagée…

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